L’autre est un je

Vincent Perrottet aime faire réfléchir ses contemporains, de manière joyeuse et malicieuse, à partir de citations qu’il anime. Jamais le plomb du savoir, toujours la circulation des idées.
Il compose des surfaces à lire, faussement désorganisées, souvent denses, où tout est accessible.
En superposant deux phrases, il met à l’épreuve nos facultés perceptives. Il invite à requestionner notre célérité à décoder et à parcourir différemment nos pensées. « Une bonne affiche, on a sans cesse envie d’y revenir. Elle ne se livre pas immédiatement. »

Dans ce message de paix, le graphiste a privilégié les couleurs primaires pour traduire synthétiquement la diversité.
Entre les contreformes, les aplats colorés et blancs semblent recomposer la paix dans un ensemble de couleurs proches de celles des drapeaux nationaux. « Vivre en paix ensemble » structure le « bon » fond. On peut filer la métaphore de ce « bon fond » et dire qu’un aspect bon enfant traverse les compositions du graphiste, ainsi qu’une approche hédoniste.
Une légèreté radieuse, une iconographie ou une littérature humaniste se déploient dans son œuvre, mais Vincent Perrottet est intransigeant quant à la responsabilité du graphiste, de ses choix et de sa nécessaire non-compromission. Depuis quatre décennies, Vincent Perrottet bataille pour une culture du regard démocratique. Une bonne affiche est utile à l’intelligence humaine, elle avive la curiosité, aiguise l’entendement. Sa considération de l’intelligence du public est entière.
Finement composée, l’affiche attrape notre regard et lui donne envie de lire. Le lecteur n’avale pas le message comme une vérité imposée, il se l’approprie et le construit. Naviguer dans l’affiche oblige à se mouvoir, stimule les échanges. Rien n’y est jamais figé.
Peut-être faut-il savourer ses partitions graphiques sur fond d’une musicalité jazzy pour en savourer le rythme entraînant. Dans son parcours, comme dans ses images, il confronte ses idées aux autres, travaille à constituer des ensembles. Vincent Perrottet avait déjà eu l’occasion de travailler à partir des textes de l’écrivain Michel Séonnet. Ici, il met en exergue « l’Autre est un je ». À nous de recomposer sur l’échiquier la place des autres, la paix, la difficulté du jeu.