Disparaître – Enfiler

Points d’impact, accidents virtuels, froissements, trous, tas : l’œuvre d’Olivier David se situe à laconfluence de la fantaisie d’une utopie et de la rigueur d’une topologie. Les multiples traitements auxquels se prête la résine donnent à ce questionnement son matériau privilégié, permettant toutes les légèretés et toutes les épaisseurs, les granulations et les transparences, les plis et les effrangements
Les questions posées par Olivier David tiennent non principalement à la forme mais sa consistance, son apparition, son effondrement. L’oeuvre est un processus où surgissement (le tas) et disparition (le trou) sont toujours contigus au même lieu, l’un pouvant toujours se renverser dans l’autre (« il y a un devenir chaîne aérienne du tas et un devenir surface proliférante du trou», dit Olivier DAVID). Le corps, lui aussi représenté, se tient sur la ligne de partage entre dévoilement et retrait ; corps troué qui ouvre directement sur celui du spectateur, corps ouvert l’instar d’une oeuvre où l’intérieur et l’extérieur, le bord et le centre deviennent caducs au profit d’un espace multidimensionnel.
Les petites collisions, les géographies intimes mises en scène par Olivier DAVID rappellent la théorie des catastrophes de René Thom ou les objets fractals de Mandelbrot ; elles explorent avec une pureté mathématique, un dépouillement ludique, apparent aléa des bouleversements formels. Ces observations discrètes introduisent une transparence qui est le point de contact entre surface et profondeur, celles-ci annulant leurs oppositions, ou un décollement, comme avec les «pousses de sol» (la sculpture est alors sans bords ni support, suspendue toute entière dans son acte de surgissement). Ces espaces d’échange et d’incertitude proposent une façon légère d’en finir avec la métaphysique, en faveur d’une rencontre entre poétique et topologie à laquelle le dessin d’une «bulle effrayée» pourrait servir d’emblème.
Texte de Bruno NOURRY – 1995